On ne badine pas avec l'amour
Je viens de créer une nouvelle catégorie, "Belles lettres", pour partager les textes qui me touchent et m'émeuvent, et font partie selon moi des plus belles pages de la littérature.
A commencer par cet extrait de cette pièce d'Alfred de Musset, qui, sous son titre laisserait croire à une distraction aimable, mais qui n'est autre qu'une tragédie.
« Adieu Camille, retourne à ton couvent, et lorsqu'on te fera de ces récits hideux qui t'ont empoisonnée, réponds ce que je vais te dire : tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n'est qu'un égoût sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière, et on se dit : J'ai souffert souvent, je me suis trompé quelques fois : mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui. »
On ne badine pas avec l'amour (acte 2 scène V)
Alfred de Musset (1810-1857)